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JOURNAL 109
Voyages en France pendant les années 1787, 1788, 1789
revenu est d'environ 5,000 livres ( 218 liv. st. 15 sh. ), appartient à présent au marquis de Mirabel, qui le tient
de sa femme, descendante des de Serres. J'espère qu'on l'a exempté de taxes à tout jamais ; celui qui, dans ses
écrits, a posé les fondements de l'amélioration d'un royaume, devrait laisser à sa postérité quelques marques
de la gratitude de ses concitoyens. Quand on montra, comme on me l'a montrée, la ferme de Serres à l'évêque
actuel de Sisteron, il remarqua que la nation devrait élever une statue à la mémoire de ce grand génie: le
sentiment ne manque pas de mérite, quoiqu'il ne dépasse pas en banalité l'offre d'une prise de tabac ; mais si
cet évêque a en main une ferme bien cultivée, il lui fait honneur. Soupé avec monsieur et madame de
Boissière, etc., et joui d'une agréable conversation. 21 milles.
Le 21. M. de Boissière, voulant avoir mon avis sur les améliorations à faire dans une ferme qu'il avait
achetée à six ou sept milles de Berg, sur la route de Viviers, où j'allais, il m'accompagna jusque-là. Je lui
conseillai d'en enclore bien une partie chaque année, finissant avec soin la chose commencée avant de passer
à une autre, ou de ne pas s'en mêler du tout ; puis je le prémunis contre l'abus de l'écobuage. Je crains
cependant que son homme d'affaires ne l'emporte sur le fermier anglais. J'espère qu'il aura reçu la graine de
navets que je lui ai envoyée. Dîné à Viviers et passé le Rhône. L'arrivée à l'Hôtel de Monsieur, grand et bel
établissement à Montélimart, après les auberges du Vivarais où il n'y a que de la saleté, des punaises et des
buffets mal garnis, ressemblait au passage d'Espagne en France : le contraste est frappant, et je me frottai les
mains d'être de nouveau dans un pays chrétien, chez les milords Ninchitreas et les miladis Bettis de M.
Chabot [ Ici l'auteur n'est pas compréhensible, même pour ses compatriotes. ZIMMERMAN. ] 23
milles.
Le 22. Ayant une lettre pour M. Faujas de Saint-Fond, le célèbre naturaliste, auquel le monde doit
plusieurs ouvrages importants sur les volcans, les aérostats et d'autres sujets de l'étude de la nature, j'eus la
satisfaction d'apprendre, en le demandant, qu'il était à Montélimart, et de voir, en lui rendant visite, un
homme de sa valeur bien logé et paraissant dans l'aisance. Il me reçut avec cette politesse franche qui fait
partie de son caractère, et me présenta sur-le-champ à M. l'abbé Bérenger, qui est un de ses voisins de
campagne et un excellent cultivateur, et à un autre monsieur qui partage les mêmes goûts. Le soir, il
m'emmena faire visite à une dame de ses amies adonnée aux mêmes recherches, madame Cheinet, dont le
mari est membre de l'Assemblée nationale ; s'il a le bonheur de rencontrer à Versailles une dame aussi
accomplie que celle qu'il a laissée à Montélimart, sa mission ne sera pas stérile et il pourra s'employer mieux
qu'à voter des régénérations. Cette dame nous accompagna dans une promenade aux environs, et je fus
enchanté de la trouver excellente fermière, très habile dans la culture, et tout à fait disposée à répondre à nos
questions, particulièrement sur la culture de la soie. La naïveté de ce caractère et l'agréable conversation de
cette personne avaient un charme qui m'aurait rendu délicieux un plus long séjour ici ; mais la charrue !...
Le 23. Accompagné M. Faujas à sa terre de l'Oriol ( Loriol ), à 15 milles nord de Montélimart ; il est en
train de bâtir une belle maison. Je fus content de voir sa ferme monter à 280 septerées de terre ; ma
satisfaction eût été plus grande si je n'y avais pas trouvé un métayer. M. Faujas me plaît beaucoup ; la
vivacité, l'entrain, le phlogistique de son caractère ne dégénèrent pas en légèreté ni en affectation ; il poursuit
obstinément un sujet, et montre que ce qui lui plaît dans la conversation, c'est l'éclaircissement d'un point
douteux par l'échange et l'examen consommé des idées qui s'y rapportent, et non pas cette vaine montre de
facilité de parole qui n'amène aucun résultat. Le lendemain, M. l'abbé Bérenger vint avec un autre monsieur
passer la journée ; on alla visiter sa ferme. C'est un excellent homme, qui me convient beaucoup ; il est curé
de la paroisse et préside le conseil permanent. Il est à présent enflammé d'un projet de réunir les protestants à
son église, et il nous parla avec bonheur du pouvoir qu'il avait eu de leur persuader de se mêler comme des
frères à leurs concitoyens dans l'église catholique pour chanter le Te Deum, le jour des actions de grâces
générales pour l'établissement de la liberté ; ils y avaient consenti par égard pour son caractère personnel. Sa
conviction est ferme que chaque parti cédant un peu et adoucissant ou retranchant ce qu'il y a de trop blessant
pour l'autre, ils pourront parvenir à un complet accord. Cette idée est si généreuse que je doute qu'elle
convienne à la multitude, indocile à la voix de la raison, mais soumise à des futilités et à des cérémonies, et
attachée à sa religion en raison des absurdités qu'elle y trouve. Il n'y a pas pour moi le moindre doute que la
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populace anglaise serait plus scandalisée de voir délaisser le symbole de saint Athanase, que tout le banc des
évêques dont les lumières pourraient être une réflexion exacte de celles de la Couronne. M. l'abbé Bérenger
vient d'achever un mémoire pour l'Assemblée nationale, dans lequel il propose son projet d'union des deux
églises, et il a l'intention d'y ajouter une clause pour faire autoriser le mariage des prêtres. Il lui semblait
évident que l'intérêt de la morale et celui de la nation demandaient que, cessant de rester isolé, le clergé
partageât les relations et les attachements de ses concitoyens. Il faisait voir combien était triste la vie d'un
curé de campagne, et, flattant mes goûts, il avançait que personne ne pouvait se livrer a la culture sans l'espoir
de voir ses travaux continués par ses héritiers. Il me montra son mémoire, et je vis avec grand plaisir la bonne
harmonie qui régnait entre gens des deux confessions, grâce, sans doute, à d'aussi bons curés. Le nombre des
protestants est très considérable dans ce pays. Je l'engageai fortement à mettre à exécution son plan de
mémoire sur le mariage, en l'assurant que, dans les circonstances actuelles, le plus grand honneur reviendrait
à tous ceux qui soutiendraient ce mémoire, qu'on devait considérer comme la revendication des droits de
l'humanité violemment et injurieusement déniés au grand détriment de la nation. Hier, avec M. Faujas de
Saint-Fond, nous sommes passés près d'une congrégation de protestants, assemblés comme des druides sous
cinq ou six beaux chênes, pour offrir leurs actions de grâces au Père qui leur donne le bonheur et l'espérance.
Sous un semblable ciel, quel temple de pierre et de ciment pourrait égaler la dignité de celui-ci que leur a
préparé la main du Dieu qu'ils révèrent ? Voici un des jours les mieux remplis que j'aye passés en France :
nous avons dîné longuement et en fermiers, nous avons bu à l'anglaise au progrès de la charrue, et nous avons
si bien parlé agriculture que j'aurais voulu avoir mes voisins de Suffolk pour partager ma satisfaction. Si M.
Faujas de Saint-Fond vient en Angleterre, je le leur présenterai avec plaisir. Retourné le soir à
Montélimart. 30 milles.
Le 25. Traversé le Rhône au château de Rochemaure. Ce château s'élève sur un rocher de basalte, presque
perpendiculaire, décelant, par sa structure prismatique, son origine ignée. Voyez les Recherches de M.
Faujas. L'après-midi, gagné Pierrelatte au milieu d'un pays stérile et sans intérêt, bien inférieur aux environs
de Montélimart. 22 milles.
Le 26. Il ne devient guère meilleur du côté d'Orange ; une chaîne de montagnes borde l'horizon sur la [ Pobierz caÅ‚ość w formacie PDF ]
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